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On ouvre un restau japonais
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L’archipel le plus subtil de Terre a fait fondre notre cœur dès notre plus tendre âge. Mais c’est seulement il y a quelques années que nous rencontrions physiquement ce chapelet d’îles sibyllines. Nous atterrissions là-bas après avoir survolé la Terre et ses déserts. Et nous débarquions dans le pays apaisé, les muscles et les sens abîmés, prêts à nous reconstruire au rythme et aux idées d’un monde inconnu. À peine à terre, nous filions directement au bain public pour profiter d’une tradition millénaire que la douche vulgaire va finir par remplacer irrémédiablement. Nous regrettions évidemment la censure venue d’Occident qui sépara les hommes des femmes dans ces établissements joyeux. Parce que pendant longtemps, on allait au sento en famille et avec ses amis, dans une joie pure et simple, et on discutait à poil, tranquillement, et cela devait être bien marrant. Nous imitions du mieux qu’on pouvait les rituels, assis sur notre minuscule tabouret. Nous frottions, massions et récurions car on se lave là-bas comme on entretient une vieille bouilloire.
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La toilette faite et notre petite serviette pliée sur la tête, nous nous glissions délicieusement dans l’eau tendre et moelleuse du grand bain. Des oranges gonflées comme des pomélos flottaient autour de nous, nous bénissant de leur huile vertueuse. Complètement sonnés par le jetlag démentiel, nous finissions par sombrer dans la chaleur d’enfer d’un sauna réglé à 95°C où une télévision, installée derrière une vitre, crachait silencieusement des jeux débiles et trop colorés. Les Japonais échangeaient leurs râles bruyants et nous séchions comme la terre après le déluge. C’est là-bas, dans ce pays d’eau que nous comprenions que notre pluie battante pouvait-être autre chose que cette drache sinistre qui recouvre notre humeur d’un voile grisâtre. Là-bas, la pluie est un chant du ciel et les gouttes, des petites perles qui coulent sur des feuilles grasses et épaisses ou qui disparaissent, dans les toisons de mousses fragiles. Depuis, quand il pleut, nous sommes simplement heureux. Ce pays qui crée des terrasses pour contempler la lune, où les papillons qui volent sont les âmes des morts, où l’on range aux yeux des autres ses objets les plus précieux, a inventé ce qu’on ne comprendra jamais ici, la cérémonie du thé. Cette suite de gestes codifiés et plutôt simples qui consiste à faire du thé avec une théière et à le servir dans une tasse, est une philosophie. Seuls quelques maitres, après des années d’acharnement, peuvent enchaîner les gestes d’or dans une volupté sans effort. Car il convient d’agir sans agir. Et pour comprendre cela, il faudrait une vie - ce dont on convient parfaitement.
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On a fondu en lisant Neige de Printemps, l’immense roman de Mishima, à l’écriture irréelle. Kiyoaki, le jeune prince aux mèches d’argent, trop faible et trop sensible, finit par mourir d’un amour qu’un Japon du XIXè siècle n’autorisait pas. La belle Satoko n’était pas celle qu’on lui destinait. C’est ce même Mishima, qui se donnera la mort sur un balcon devant une foule, se poignardant d’un sabre. Son proche ami devait finir le travail par une décapitation fière et décidée. Mais dans la vie vraie, et même au Japon, on hésite un peu à décapiter son copain.
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Nous avons croisé là-bas des crevettes crues presque vivantes qui finirent par trouver la paix éternelle dans notre corps vivifié, des tempuras de presque tout à la chapelure frêle et diabolique, des filets tout juste levés de poissons tués à la ikejime d’une tendreté floconeuse. Nous rêvions de dévorer des bentos préparés par notre moitié, forcément délicieux et dont les algues coupées avec délicatesse formeraient de gentils dessins à déchiffrer*.
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Alors, quand nous nous sommes attablés au petit comptoir de bois patiné du joli restaurant Haikara et qu’entre les vapeurs et les effluves nous avons dégusté un karaage irréel, on a réalisé que nous pouvions finalement survivre à la fermeture unilatérale des frontières japonaises face à nos viles envies touristiques. Quelques coups de fils plus tard, Chef Sho et Chef Nico mijotaient en cuisine un petit bonheur de recettes pour notre PNY du Faubourg Saint-Antoine. À l’honneur, le plat qui a mis Chef Sho sur toutes les papilles des fanatiques de bonne bouffe de paname, et que son système d’extraction un peu léger - le fameux Karaage - a maintenant fait disparaître de la carte d’Haikara.
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Chers clients, nous mettons donc à la disposition du talent du grand Chef Sho notre système d’aspiration des fumées calibré à 5500m3/h et nous vous proposons, de manière inédite, cette éblouissante recette. Mais aussi, le burger qui traînait dans les rêves inavoués de Chef Sho qui nous a renversés et les fries shaka shaka, les plus sexy du printemps. C’est pour un mois et des broutilles et c’est indispensable.
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TERIYAKI HANBÀGĀ Steak haché PNY pané au panko, sauce teriyaki et mayonnaise maison aux condiments œuf dur daikon wasabi
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CHICKEN KARAAGE La recette ultime de Chef Sho, qui dégage tant de fumée qu’il n’a jamais pu la faire dans son restau Hauts de cuisse de poulet marinés frits, mayonnaise et sauce teriyaki
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SHAKA SHAKA FRIES French fries in a bag, ajoutez les épices shichimi tôgarashi, shakashaka, and enjoy !
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*Nous faisons référence ici à cette mère célibataire qui électrisa les réseaux sociaux en postant chaque jour les bentos kyaraben, à peine croyable, qu’elle préparait à sa fille lycéenne qui ne lui adressait plus la parole. Chaque jour, le petit plateau était porteur d’un message, d’un encouragement, d’une gentillesse et parfois même d’un léger reproche. Après trois années et le bac en poche, le dernier bento fut réalisé accompagné d’un message. « Chaque matin je me suis levée aux aurores pour préparer ton bento, à en avoir envie de tout arrêter. Préparer un simple bento est difficile mais un bento kyaraben demande beaucoup plus de travail. J’avais décidé que je pourrais arrêter le jour où tu me diras joyeusement « Maman j’attends avec impatience le kyaraben de demain ». Mais ce jour n’est jamais venu. C’est ainsi que ces kyaraben sont devenus un combat entre toi et moi. Mais en fait, c’était un combat contre moi-même. Voilà ce qui me rendait heureuse. C’est ce qui m’a donné la force de continuer jour après jour à me réveiller aux aurores. C’était ma façon de te montrer mon amour. Aujourd’hui c’était le dernier. Et cela me rend triste. »
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ONLY IN PNY FBG ST-ANTOINE OPEN 7/7 SUR PLACE ET EN DELIVERY
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